« Droit de synchro » et droit moral : l’art de vivre ensemble

par | 29 mars 2024 | Cinéma, Musique, Télévision

Le « droit de synchro », c’est la possibilité d’utiliser (de synchroniser) des musiques préexistantes dans des films cinématographiques ou des programmes audiovisuels. Mais il y a deux impératifs : obtenir les autorisations et respecter les mentions obligatoires.

1. Les autorisations préalables

Des autorisations préalables sont nécessaires.
  • Celles des éditeurs musicaux pour les œuvres de leur répertoire.
  • Celles des producteurs phonographiques pour leurs enregistrements.
Des « contrats de synchronisation » sont alors signés avec les producteurs cinématographiques ou audiovisuels. Mais, incessible par nature, le droit moral de paternité reste la propriété des auteurs-compositeurs et des artistes-interprètes.  

2. Les mentions obligatoires

Le fait de ne pas mentionner leurs noms est automatiquement condamné par les tribunaux. Une affaire récente jugée en référé (TJ, Ord. Ref. 16 janvier 2024 n°23/54112) en donne l’illustration. Cinéfrance Studios a produit le film cinématographique « Barbaque ». Pour le générique du film, elle a souhaité utiliser une œuvre musicale préexistante. Son choix s’est porté sur l’œuvre musicale « Le Crime ». Elle demande alors l’autorisation à la société d’édition titulaire des droits patrimoniaux sur cette œuvre. L’autorisation est donnée et un contrat de synchronisation est signé. Puis le film est commercialisé. Les deux compositeurs de l’œuvre musicale constatent que leurs noms ne figurent pas dans le générique. En effet, seule la mention « Musique originale : M.Z » apparaît au générique et sur la jaquette du DVD. Faisant valoir la violation de leur droit moral, ils assignent Cinéfrance Studios en référé. Ce droit est incessible. C’est pourquoi ce sont les compositeurs qui ont intenté l’action et non la société d’édition.

3. La sanction de l’omission

Le Tribunal judiciaire leur donne raison. L’obligation de faire figurer le nom des compositeurs est fondée sur les articles L. 111-1 et L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle. Cette obligation était également inscrite dans le contrat signé avec la société d’édition. L’omission de cette mention est une contrefaçon pour atteinte au droit moral de paternité des compositeurs. Cette omission constitue, par ailleurs, un trouble manifestement illicite justifiant la procédure en référé. ↪En effet, le préjudice des compositeurs est bien réel en raison, notamment, de la large diffusion du film « Barbaque ». La société Cinéfrance Studios est par conséquent condamnée à verser à chaque compositeur la somme de 5.000 euros. Elle est également condamnée à faire insérer par les diffuseurs, au générique du film et sur tous supports, le nom des compositeurs. Le droit de paternité est facile à respecter. S’en dispenser peut coûter cher !