Intermittent du spectacle : attention à la direction de fait d’une association !

par | 23 mars 2021 | Cinéma, Télévision, Spectacle Vivant

Les intermittents du spectacle créent fréquemment une association pour développer leurs activités artistiques. C’est le cas des formations musicales et des compagnies théâtrales. Des contrats de travail sont alors conclus avec l’association. Les cachets correspondants sont déclarés à Pôle Emploi. Celui-ci indemnise l’intermittent au titre de l’Allocation d’Aide au Retour à l’Emploi (ARE) durant les périodes de chômage (Annexes 8 et 10 de la convention Unédic). Le schéma est classique mais Pôle Emploi peut le remettre en cause. La sanction sera alors le remboursement des sommes perçues et la radiation.

L’absence de réel contrat de travail

Lors d’un contrôle, Pôle Emploi tentera de démontrer l’absence de lien de subordination et donc l’absence de contrat de travail.

La présomption de contrat de travail

Le code du travail prévoit une présomption de contrat de travail pour tout artiste du spectacle engagé en vue de sa production. Cela suppose que l’artiste n’exerce pas son métier de manière indépendante qui nécessiterait une inscription au registre du commerce. Cette présomption peut être contestée.

Les critères du contrat de travail

Les critères de l’existence d’un contrat de travail ont été définis par la jurisprudence.Il n’y a contrat de travail qu’en présence d’un lien de subordination, c’est à dire :

– l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur

– qui a le pouvoir de donner des ordres, des directives, d’en contrôler l’exécution

– et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Si ces conditions ne sont pas remplies, l’intermittent peut être déclaré dirigeant de fait.

La direction de fait incompatible avec un lien de subordination

Pour dire que le lien de subordination n’existe pas, Pôle Emploi tentera de prouver que l’intermittent se comporte en réalité comme un dirigeant de fait de l’association.

Les critères de la direction de fait

Cette question a donné lieu à des jurisprudences récentes. Ainsi Pôle Emploi a récemment obtenu gain de cause contre un membre fondateur d’une association d’arts vivants. Celui-ci avait conclu des contrats de comédien avec l’association. Il avait aussi conclu un contrat de travail de chargé de production dont il n’avait pas informé Pôle Emploi.

Le lien de subordination a été déclaré inexistant. Bien que n’exerçant aucun mandat social officiel, Pôle Emploi a considéré que l’intermittent était dirigeant de fait car :

– il avait exercé les fonctions de trésorier,

– il disposait de la procuration sur le compte bancaire de l’association,

– il procédait seul à l’établissement de l’ensemble des déclarations sociales,

– les attestations AEM le faisaient apparaître comme la personne à joindre pour l’employeur avec son téléphone personnel,

– il avait accepté bénévolement des fonctions administratives,

– il avait signé pour le compte de l’association une convention de résidence avec une autre association,

– il s’était également à cette occasion présenté comme créateur et directeur de l’association,

– il avait signé des documents en lien avec le fonctionnement de l’association durant les contrats de travail, mais également en dehors, y compris des chèques,

– l’association était domicilié à son à son adresse,

– le président de l’association était son conjoint.

Les sanctions de la direction de fait

L’intermittent avait entretenu la confusion entre la qualité d’intermittent du spectacle salarié, celle de salarié de l’association en tant que chargé de production et l’exercice de fonctions administratives bénévoles dans la gestion quotidienne de l’association. Or un demandeur d’emploi ne peut avoir une activité bénévole au sein d’une association si elle se substitue à un emploi salarié

L’intermittent a donc été déclaré dirigeant de fait et la validité des contrats d’intermittent remise en cause.

Pôle Emploi était donc bien fondé à exiger le remboursement des sommes versées à tort.

Délais de prescription de l’action en remboursement

L’action en remboursement des allocations d’assurance se prescrit par 3 ans à partir du versement des sommes.

En cas de fraude, la prescription est de 10 ans.

Pour ne pas perdre vos droits, n’hésitez pas à faire analyser votre situation afin de mettre en place une organisation compatible avec le régime de l’intermittence du spectacle.