Le sort des avances en cas de rupture anticipée du contrat d’artiste

par | 14 janvier 2017 | Musique

La Cour de Cassation a rendu un arrêt de principe le 8 juillet 2015 sur le calcul des dommages-intérêts en cas de rupture anticipée d ‘un contrat de travail à durée déterminée d’un artiste interprète.

La question était de savoir les redevances et les avances sur redevances doivent être prises en compte pour le calcul des dommages-intérêts dus en réparation du préjudice de l’artiste en cas de rupture anticipée du contrat.

Dans cette affaire, un artiste avait concédé à Universal Music France l’exclusivité de fixation de quatre albums moyennant un cachet de 100 euros par enregistrement et le versement de redevances et d’avances sur redevances.

A l’issue des enregistrements et de l’exploitation des deux premiers albums, Universal Music a décidé de mettre fin de manière anticipée au contrat et a versé à l’artiste une indemnité en vertu de l’article L1243-4 du code du travail.

Cet article stipule que « La rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8. »

Estimant que cette indemnisation était insuffisante, l’artiste a saisi la juridiction prud’homale. Dans le cadre de son pourvoi, Universal Music France reproche à la Cour d’Appel de l’avoir condamnée, outre les montants déjà versés, à payer à l’artiste une somme de 108.000 euros au titre de son préjudice matériel et une somme de 30.000 euros en réparation de son préjudice moral.

Au soutien de son pourvoi, Universal Music France fait valoir que les sommes ayant la nature de redevances et d’avances sur redevances rémunèrent des droits voisins et ne peuvent être prise en considération dans le cadre de l’application de l’article L1243-4 du code du travail.

La Cour d’Appel a en effet considéré que les sommes constituées par les avances étaient de nature forfaitaire et non liées à un aléa économique et qu’elles pouvaient donc être prise en considération pour le calcul de l’indemnité minimum visée par l’article précité.

Reprenant les termes de l’article L7121-8 du code du travail (qui stipule que les redevances n’ont pas la nature de salaire dés lors que la présence de l’artiste n’est plus requise pour exploiter l’enregistrement et que cette rémunération est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation de cet enregistrement), la Cour de Cassation rejette le pourvoi.

Son raisonnement est limpide : elle constate, après analyse du contrat, d’une part, que le versement des avances était conditionné à la présence de l’artiste lors de son entrée en studio et lors de l’achèvement de l’enregistrement et, d’autre part, que ce versement n’était effectué ni en fonction du produit de la vente ni en fonction du produit de l’exploitation de cet enregistrement ; ces avances doivent donc être considérée comme ayant la nature de salaire et doivent être prises en compte pour le calcul des dommages-intérêts prévus par l’article L1243-4 du code du travail.

Cette décision est à mettre en parallèle de la circulaire n°DSS/5B/2012/161 du 20 avril 2012 prise en application de la loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2012 qui est venue fixer le régime social des redevances et avances sur redevances et qui conduit de plus en plus fréquemment l’URSSAF à requalifier les avances en salaires et à procéder à des redressement de cotisations sociales.